samedi 9 juillet 2011

Episode 29 : Tyr, reine de beautés

Ruines romaines au bord de Mère Méditerranée (copyright - Z. Haddad).
Que je te parle donc de Tyr que j’évoque dans mon épisode 28. Tyr, alias Sour, c’est un petit bijou du Sud du pays, à quelque soixante-dix kilomètres de Beyrouth. D’abord, la route pour y arriver est très agréable. Elle longe la mer, est plantée de palmiers à cent lieues des oliviers du Nord, et encadrée de champs de bananes et de vergers d’orangers et autres fruits en tous genres. En contrebas, Mère Méditerranée est sublime, tant elle décline jovialement les azurs.
L’entrée dans Sour te fait débarquer dans un autre monde, encore éloigné de la transformation débridée à laquelle s’est attelée la capitale depuis quelques années maintenant. Les maisons du bord de mer, qui embrassent le vieux port, sont basses, accumulent les décades, rappellent les traditions architecturales révélées dans des villes comme Byblos, Batroun ou Jounieh, et semblent attendre de prometteuses rénovations. Piquetage de pimpantes tuiles rouges, ravalements de leurs belles pierres crème, rafraîchissement de leurs volets rouges, verts ou bleus. Dans le centre, les bâtiments sont assez bas et se mélangent à des centres commerciaux flambants neufs et réunissant toutes les marques mondialement connues ou inconnues. Un peu partout, pourtant, les projets de développement immobilier et d’aménagement urbain commencent à poindre.
Des plus accueillants, les visages mats portent de belles couleurs ensoleillées depuis plusieurs générations. Leur accent est souvent inattrapable pour mes oreilles qui ont parfois de la peine à séparer les mots. Je crois que, si le circonflexe existait dans l’alphabet arabe, Tyr en épuiserait le stock. Toutes proportions gardées, cela me rappelle les variations de tonalités d’un canton helvète à l’autre. En ce jour ensoleillé et caressé par le vent du large, tous partent, en une joyeuse communion, retrouver l’extraordinaire plage publique de la ville. Vélos, voitures, piétons, scooters et autres pétrolettes se retrouvent sur cette impressionnante bande de sable qui s’étend sur plusieurs centaines de mètres. Arrivé au coucher du soleil, je ne peux que retenir mon souffle tellement le spectacle est magnifique. Devant moi, des rouges, des oranges, des bleus, des blancs se confondent, en fusion, avant de plonger dans l’horizon. 
Côté face: la plage publique divisée en zones cafés/restaurants (copyright - Z. Haddad).
Côté pile (copyright - Z. Haddad).
Et la mer... (copyright - Z. Haddad).
Rupestre dada
Avant d’arriver là, je consacre l’après-midi à l’un de mes anciens dadas : les vieilles pierres. À Tyr, elles témoignent fièrement de la croisée des chemins phéniciens, romains, grecs, byzantins, vénitiens, ottomans, occidentaux, qui se sont succédé sur ces rivages. La pièce maîtresse est, sans doute, l’imposant hippodrome romain, encerclé d’une route pavée, elle-même enjambée par un arc de triomphe. Perché tout en haut des tribunes de l’ovoïde, je scrute la vaste étendue de course, ainsi que les colonnes et les gradins millénaires qui me rappellent mes cours de latin à l’école et les épopées hollywoodiennes des années cinquante et soixante. En un clin d’œil, je voyage à travers les âges et côtoie une foule hétéroclite, bigarrée, et bimillénaire. De quoi largement relativiser ! 
L'hippodrome et ses gradins millénaires (copyright - Z. Haddad).
Convoitée ou conquise par maintes histoires, Tyr continue d’écrire la sienne, à quelques kilomètres de la frontière Sud du Liban. À quelques kilomètres du pays au nom incertain. En tous cas, les panneaux d’indication, que je croise à chaque rond-point, sont formels, la Palestine s’ouvre à quarante-sept kilomètres de là. Le souvenir de l’attaque de l’été 2006 se rappelle probablement ainsi à chaque mémoire. Je revois ces funestes images que j’ai mouillées de mes larmes et espère qu’une sagesse durable s’installera enfin dans cette magnifique région.
Indication (copyright - Z. Haddad).
Pour ma prochaine balade à Tyr, je me promets d’aller visiter la réserve naturelle, où des tortues viennent pondre sous l’œil bienveillant de quelques fervents amis de la nature. En attendant, sac et ressac...


2 commentaires:

souha a dit…

très belles photos, surtout les photos 2,3 et 4 ..j'adoooooore la 2, on dirait une peinture!...ainsi que les reflexions autour de cet ancien monde qui se relit et se reflète dans le présent...on pense beaucoup aux peuples anciens qui remontent si loin.....et qui sont là....et toujours revient en filigrane la question 'du pays au nom incertain'.....belle article zahi!

Zahi a dit…

merci beaucoup, Souha! c'était vraiment magnifique!